dimanche 25 septembre 2016

Anne Hébert, pionnière de la plume fémine au FIL



Publié par Esther Hardy le Dim. 25 septembre 2016 à 0h00 - Contenu original

Crédit photos: Fonds Anne Hébert, Service des bibliothèques et archives de l’Université de Sherbrooke. 1964


Le Festival International de la Littérature a souligné le centenaire d’Anne Hébert en un spectacle « Le chant de la cigale crépite comme un feu de bois », un hommage à sa foisonnante œuvre à la Place des Arts vendredi le 23 septembre à la 5esalle. Evelyne de la Chenelière comédienne québécoise qui porte son œuvre depuis longtemps et Azyadé Bascunana comédienne française lisaient ensembles des extraits de ses romans et de sa poésie.




Portrait d'Anne Hébert

Par Monique Bosco




Sous un éclairage tamisé, les deux comédiennes ont, de leur souffle, transmis les paroles de cette auteure éprise de liberté dans une salle où on pouvait entendre un cellulaire très discret sonner dans le fin fond d’une sacoche… Enfin, une salle religieusement silencieuse par un public attentif très intéressé.




Anne Hébert



Le FIL connaît son art et sait judicieusement mettre en valeur les textes d’Anne Hébert dans une sobriété de scène qui laisse toute la place à la grandeur des mots, à la profondeur de leur sens, à la beauté et aux émotions qu’elles suscitent. D’un calme olympien, Évelyne de la Chenelière a lu avec la chaleur et la suavité de sa douce voix d’alto, dans un contrôle et une profondeur confirmant ses talents de comédiennes et son expertise d’auteure amoureuse des lettres. Très spontanée, Azyadé Bascunana d’une voix qui dégage de belles notes naïves témoignant de ses jeunes années formait une complice bien agencée pour déployer l’œuvre d’Anne Hébert qui a vécu en France.




Évelyne de la Chenelière





Azyadé Bascunana


Tout en délicatesse, la mise en lecture de Karine Assathiany est intelligente, artistique et nuancée, soulignant d’autant plus la qualité de l’œuvre qu’elle sert.


Je vous ai réservé quelques extraits pour vous mettre l’eau à la bouche :

« Mes deux petites mules aux pieds se balancent comme deux oiseaux. »

« Toi qui te lamentes dans mes veines comme une blessure! »

« Toi l’amour de ma vie, mat de mon voilier… »

« La perpétuité du silence où je sombre. »




Anne Hébert



Sur cette grande dame de la littérature québécoise :

Native de Ste-Catherine-de Fossambeault, d’une famille d’auteurs et de poètes, Anne Hébert a baigné dans la littérature dès son jeune âge. Son père poète, critique littéraire et animateur radio l’a guidé et lui faisant découvrir des œuvres d’ici. Sa mère éprise de théâtre lui a donné le goût de découvrir l’écriture pour la scène. Dans sa jeunesse, Anne a passé de nombreux étés à créer des pièces de théâtre et à les monter avec ses cousins. Le poète Hector de Saint-Denys Garneau, son aîné de quatre ans, faisait partie de la bande. Très important dans sa vie, il l’initiera à d’autres auteurs tels qu’Eluard, Supervielle, Claudel, Reverdy, Ramuz et à la poésie.





Anne Hébert
Crédit: Gilbert Duclos


Cette pionnière de la plume féminine au Québec parle d’elle-même en ces termes : « Je crois que, foncièrement, je suis une révoltée. Je n’accepte pas les choses telles qu’elles sont. Quand on a une fois dans sa vie désirée l’absolu, on ne peut pas se contenter de la réalité telle qu’elle est. » Très édifiant!


Malgré ses trente-deux ans passés en France, elle disait ne jamais s’être exilée, mais simplement y avoir habité pour prendre un recul afin de mieux raconter le Québec. De retour à Montréal, elle a ensuite écrit sur la France.





Anne Hébert


Cette prolifique auteure a publié dix romans, cinq recueils de poésie, cinq pièces de théâtre, a écrit neuf scénarios de film, etc. Elle a reçu vingt prix littéraires, dont le prix de l'Académie royale de Belgique, pour Kamouraska, le prix du Gouverneur général, pour Les Enfants du sabbat et le prix Femina, pour Les Fous de Bassan. Elle a reçu un doctorat honoris causa de l'Université Laval en 1983, qui s'ajoutait aux précédents : Toronto en 1969, Guelph en 1970, UQAM en 1979 et McGill en 1980.


Une impressionnante documentation de près de 6000 documents qui comporte l’intégralité de l’œuvre hébertienne est savamment conservée au Centre Anne-Hébert de l’Université de Sherbrooke. Veillant sur sa mémoire, ils ont aussi souligné son centenaire en tenant un colloque international en juin dernier.


Maintenant, il ne nous reste qu’à replonger dans ses inspirants écrits et nous nourrir de son verbe et de sa poésie.





mercredi 21 septembre 2016

À la radio - chroniqueuse culturelle au 103,3 fm

Esther débute une chronique culturelle à la radio du 103,3 fm de Longueuil sur l'émission matinale «De bonheur le matin» animée par Charles Gaudreault, elle est en onde de 9h00 à 10h00  les mercredis aux 2 semaines.

Le travail de chroniqueuse lui plait énormément...

Sa première était le 21 septembre!

Elle a parlé de la célèbre auteur québécoise Anne Hébert:

  • sa vie

  • son oeuvre 

  • son centenaire de naissance (1916-2016)

  • la pièce «Clara» de Pierre Yves Lemieux, une création scénique inspirée de son roman
    «Aurélien, Clara, Mademoiselle et le lieutenant anglais» 
  • activité hommage au Festival de la littérature

Voici le lien pour écouter la chronique complète d'Esther :




Bon écoute!!!

Ne vous gênez pas pour laisser vos critiques et commentaires.

C'est le début de tout et on veut s'améliorer...


mardi 13 septembre 2016

Clara : Pierre Yves Lemieux incarne la poésie d'Anne Hébert


Publié par Esther Hardy le Mar. 13 septembre 2016 à 9h00 - Contenu original

Crédit photos: Marie-Andrée Lemire


Le théâtre de l’Opsis présente la pièce Clara à l’Espace Go jusqu’au 1er octobre, dans une mise en scène de Luce Pelletier, avec Émilie Bibeau, Étienne Pilon, Alice Moreault et François Xavier Dufour. Tirée du roman d’Anne Hébert Aurélien, Clara, Mademoiselle et le lieutenant anglais, cette magnifique création pour la scène signée Pierre Yves Lemieux est une ode à la poésie de la célèbre auteure québécoise.
D’une harmonie artistique remarquable, Pierre Yves Lemieux a su peaufiner une œuvre touchante, sensible et tout en finesse. De plus, la mise en scène intelligente et raffinée de Luce Pelletier, la distribution de comédiens judicieusement agencée, les talentueux artistes sur scène, les techniciens, combinés à la superbe plume d’Anne Hébert et au travail d’orfèvre de Pierre Yves contribuent à nous offrir un spectacle profondément humain et d’une puissante facture artistique.


Clara est un mélange harmonieux de talent, de beauté, de poésie avec un soupçon de génie, une œuvre d’art simple, humaine et de haute qualité artistique.



Anne Hébert


Je paraphrase les paroles d’Anne Hébert, dont nous célébrons cette année le 100e anniversaire de naissance : « On peut brasser le monde à grand coup de gueule ou le changer avec la beauté. »


L’histoire…Clara naît entre deux guerres, celle(s) du monde (1914-18 et 1939-45) et celle de son père qui se bat pour survivre après la mort de son épouse en couche. Il arrivera à guider sa prodigieuse jeune fille Clara, malgré la détermination de celle-ci, à suivre ses élans quoiqu’il lui en coûte. Déjà endeuillée de deux mères à 14 ans, Clara est une de ces personnes qui connaît sa voie au-delà de tous les conseils des adultes. Pleine d’espoir, fraîchement emplie de connaissances, de rêves et d’aspirations légitimes, elle découvre les joies adultes bien avant son heure…



Clara et Le Lieutenant


« Mon Dieu je vous connais pas mais faites que le Lieutenant ne me prenne pas comme un chat prend une chatte. En lui enfonçant ses crocs dans la nuque. » dixit Clara.


La puissance d’évocation de la mise en scène et de l’écriture de Pierre Yves Lemieux est indéniable. Clara a un grand souffle qui malgré la trame très dramatique de l’histoire, vient se déposer tout en douceur en nous, spectateurs.


Pierre Yves Lemieux réussit à garder l’exactitude des ambiances, des intentions et de la poésie du magnifique roman. Et friande de son talent, je l’ai rencontré pour en savoir plus. Entrevue avec le prolifique Pierre Yves Lemieux.




Pierre Yves Lemieux
Crédits: Mario St-Jean


Moi :
Je suis curieuse de connaître les répliques des acteurs tirées du roman et celles que tu as peaufinées de ta plume, car la poésie du texte de la pièce est exceptionnelle.

PY :
Dans le roman, il y a uniquement 15 lignes de dialogue. Donc, j’ai dû creuser dans le matériel que j’avais dans le roman, soit les descriptions de la nature, la narration et d’autres écrits d’Anne Hébert, pour laisser les personnages s’exprimer et nous guider dans l’histoire. Dans le roman, l’ambiance décrite par les descriptions de la nature présente l’action qui va suivre. Je les ai utilisées pour illustrer la vie intérieure des personnages, créer les ambiances afin d’introduire ou de terminer une scène.

Ensuite, j’ai dû beaucoup réfléchir pour déterminer quel personnage allait donner chacune des répliques. Le choix allait être déterminant pour la trame dramatique et la logique de l’action. Alors, les décisions se sont imposées. Néanmoins, il n’y a aucune ligne de texte qui est inutile. Tout est réfléchi, testé et approuvé.


Moi :
Le roman doit être très poétique alors, car plusieurs lignes m’ont beaucoup touchée, c’est très beau.

PY :
Oui en effet, l’écriture d’Anne Hébert est très particulière. Elle a fait beaucoup de poésie et ses romans en sont aussi teintés. J’ai lu le roman Aurélien, Clara, Mademoiselle et le lieutenant anglais en 1999 et je n’ai pas arrêté d’y penser, de songer à la structure, à le transformer pour le théâtre. Le roman m’a beaucoup inspiré…




Aurélien et Le Lieutenant


Moi :
Tu as développé une technique que je n’avais jamais vue sur scène. Arrivant à faire dialoguer deux personnages qui ne sont pas dans le même lieu, puis les voir se retrouver au même endroit l’instant suivant. C’est innovateur et génial comme effet dramatique!


PY :
Oui c’est difficile à expliquer, il faut le voir. Ma trame narrative est empreinte de rencontres de deux personnages dans le même lieu et qui sont à la fois dans deux lieux différents! Et ça marche, on comprend très bien.

C’est d’une adresse et d’une cohésion remarquable. Il illustre les liens intérieurs des personnages… démontrant que même s’ils ne sont pas ensemble physiquement, ils le sont de cœur et en pensées! C’est magnifique. Une très belle pièce, empreinte d’une profonde humanité qui bouleverse tout en beauté…


Et une superbe rencontre avec Pierre Yves. Comme il le dit si bien : « on est toujours seul derrière son ordinateur, alors on va se reprendre pour parler théâtre! »


Pierre Yves Lemieux a plus d’une trentaine de pièces à son actif. Ce processus narratif qu’il innove est extrêmement puissant sur scène.



Clara et Mademoiselle


Soulignons le talent de l’interprète de Clara, la jeune comédienne Alice Moreault tout fraîchement sortie de l’École Nationale. Elle a incarné Fifi Brindacier tout l’été et déjà la voici de nouveau sur scène avec un jeu à la fois raffiné, minutieux et spontané. Émilie Bibeau est parfaite dans le rôle de Mademoiselle, intelligente et émouvante à la fois. François Xavier Dufour, un talentueux comédien incarne Le Lieutenant qui nous surprend par la précision de son jeu autant en anglais qu’en français, il n’a aucun accent… que de la justesse. Et Étienne Pilon campe un Aurélien touchant, aimant et bouleversé à souhait.





Luce Pelletier




J’ai beaucoup apprécié la courtoisie de la mise en scène qui a savamment évoqué les scènes les plus bouleversantes avec d’autant plus de beauté, évitant ainsi de rendre le public voyeur avec des scènes de nudités crues lorsqu’il est possible avec le talent de Luce Pelletier d’illustrer ces moments clefs avec art.


La volonté du théâtre de l’Opsis d’offrir des spectacles hautement achevés sur le plan artistique est éminemment atteinte avec la pièce Clara. Contrairement au penchant actuel qui est de chercher à valoriser l’image, la compagnie donne priorité à la parole d’auteurs et à la direction d’acteurs. Défi plus que réussi!